Cass. com. 22-1-2025 n° 23-18.328 F-D, Sté Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique c/ Z.

 

 

  • Les faits

Un contrat de construction de navire est conclu entre un armateur et une société pour un prix de 950 000 euros.

L’amateur refuse de payer à la société deux factures qui s’élèvent à la somme globale de 284 795 euros.

La société est autorisée à faire procéder à la saisie conservatoire du navire.

Une banque consent à l’armateur une « garantie à première demande » entraînant la mainlevée de cette saisie.

A la demande de la société, la banque paie la société et est remboursée, par le jeu d’une délégation de paiement signée par l’armateur, grâce au débit de même montant opéré par elle sur le contrat d’assurance-vie de ce dernier.

L’armateur agit alors en responsabilité contre elle, en soutenant qu’elle a commis une faute dans les conditions de mise en œuvre et d’exécution de la garantie.

 

  • La procédure

En première instance, le Tribunal fait droit à la demande de l’armateur.

La Cour d’appel confirme ce jugement.

La Cour de cassation rejette le pourvoi de la banque et donne raison à l’armateur.

 

  • La décision de la Cour de cassation :

La Cour de cassation décide que la banque s’était engagée à honorer, sur demande de la société, l’obligation même de l’armateur et que cet engagement constituait un cautionnement :

la banque avait déclaré se porter garante du débiteur principal (l’armateur) vis-à-vis du bénéficiaire (la société) pour un montant maximum de 284 795 € en principal, intérêts, frais et accessoires pour garantir le paiement de cette somme conformément à l’ordonnance valant saisie conservatoire du navire ;

la banque n’avait pas renoncé dans l’acte à faire valoir d’objection ou d’exception, ou d’autres circonstances tenant à l’obligation principale.

 

Par la suite, la banque avait commis une double faute, d’une part, en versant 284 795 € à la société sans en aviser d’abord l’armateur, alors que celle-ci ne disposait d’aucune créance exigible, en l’absence de tout jugement exécutoire à l’encontre de l’armateur, ce que ce dernier lui aurait immédiatement signalé s’il en avait été informé, d’autre part, en mettant en œuvre la délégation de créance signée à son profit alors qu’elle avait perdu son recours contre l’armateur.

Cette faute avait causé à ce dernier un préjudice égal à la somme prélevée sur son assurance-vie, justifiant que la banque soit condamnée à lui payer des dommages-intérêts équivalents. 

 

  • Portée de l’arrêt :

Rappel de la différence entre « la garantie autonome » et « le cautionnement » :

  • La garantie autonome est l’engagement par lequel le garant s’oblige, en considération d’une obligation souscrite par un tiers, à verser une somme soit à première demande, soit suivant des modalités convenues (C. civ. art. 2321, al. 1)
  • Le cautionnement est le contrat par lequel une caution s’oblige envers le créancier à payer la dette du débiteur en cas de défaillance de celui-ci (C. civ. art. 2288, al. 1).

 

Le critère essentiel de distinction réside donc dans l’objet de l’obligation qui doit être, s’agissant d’une garantie autonome, indépendant du contrat de base, alors que la caution est un accessoire du contrat principal entre le débiteur et son créancier.

 

Article du 3 avril 2025

Pauline SIX

Avocat en Droit des affaires et droit civil