LA QUESTION JURIDIQUE :

Les renseignements obtenus déloyalement par un détective privé peuvent-ils être admis comme preuve ?

 

LA REPONSE :

Oui.

 

Un arrêt de la Cour de cassation rendu le 17 septembre 2025 (Cass. com. 17-9-2025 n° 24-14.689 F-B, Conseil régional de l’Ordre des experts-comptables Provence-Alpes-Côte d’Azur c/ X) vient nous le rappeler :

 

Les renseignements obtenus déloyalement par un détective privé peuvent être admis comme preuve.

 

 

 

Passons à l’analyse plus détaillée de cet arrêt de la Cour de cassation (Cass. com. 17-9-2025 n° 24-14.689 F-B, Conseil régional de l’Ordre des experts-comptables Provence-Alpes-Côte d’Azur c/ X)

 

 

  • Faits et procédure :

Mme W exerçait une activité d’expert-comptable au sein de sa société EB Gestion, lorsque le conseil régional de l’Ordre des experts-comptables de Provence-Alpes-Côte d’Azur (le Conseil) a fait mandater un détective privé qui s’est présenté, sous une fausse identité, auprès de la société en cause comme un client ayant un projet de création d’entreprise et de suivi de comptabilité, afin que soit établi que cette société exerçait illégalement la profession d’expert-comptable.

Après établissement de ce rapport, le Conseil a assigné en référé Mme W et la société EB Gestion pour qu’il leur soit ordonné de cesser toute prestation, activité ou mission de comptabilité et le versement d’une provision à valoir sur la réparation de son préjudice.

Le Conseil a été débouté.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence a écarté ce rapport, obtenu par un procédé déloyal (mensonge, à savoir la déclaration d’une fausse qualité) et constituant une preuve illicite.

 

  • Sur la solution adoptée par la Haute Juridiction :

La Haute Juridiction a cassé cette décision, au visa l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 9 du code de procédure civile, en indiquant que :

« En application de ces textes, dans un procès civil, l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi ». 

En l’espèce, la Cour d’appel aurait dû procéder à ce contrôle de proportionnalité.

 

Article du 20 novembre 2025

Pauline SIX

Avocat en Droit des affaires et civil

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